Guy Girard

LES TROIS ETOILES

Il y a sous terre des étoiles plates
et d’autres qui fleurissent au cœur des nuages
J’ai avec ton absence partagé cette certitude
qui fait aller le monde un peu moins de travers
dans le décousu de la couleur bleue
La voie étroite aura hissé son pavillon de chrysanthèmes
sur le front du cyclope cycliste
qui d’un seul coup de pédale fait le tour du soleil
à l’heure où vont mourir les avocats de la nuit
Jusqu’au bout ils refuseront de livrer le sésame sans l’horreur
On appellera on criera on entendra geindre de sous terre
on saura que ce sont des graines qui germent
dans la main des momies oubliées
Là-bas certains se seront déjà levés de table
de vieux rois aux couronnes cabossées
recommenceront à nager dans l’abreuvoir volcanique
Je pense dès lors à une coccinelle je la vois
battre le tambour dans le jardin qui fut un ossuaire
Est-ce bien cela l’innocence ou n’est-ce qu’une île déserte
cernée de sabots sans ailes personne ne le sait
Une maison peut ici s’écrouler sous les bravos
de nos créatures invisibles ô mes amis je vous attends
dans ses ruines qui seront comme des fougères
balayant le bout du monde de leurs syllabes de buis
Ne vous trompez pas de fenêtre à ouvrir
Il y a derrière tout ça d’immenses plages de sable mouillé
sur lesquelless vont munis d’extincteurs les voleurs de feu
Attendons ensemble les lézards
sous les nuages engourdis d’encre et de cendres
Le ciel bien sûr n’en fait qu’à sa tête
C’est encore un enfant qui a toujours faim
de caravelles et d’hérésies c’est aussi une rose trémière
qui a pour ombre la ligne d’horizon
Allez jusque là-bas on y trouve des coquillages
dans lesquels s’entend le bruit de l’enfer

Ne jamais en revenir ni jamais tresser un nid
pour les dociles oiseaux de Saturne
Car il y a sous terre seulement trois étoiles
qui sont dans l’éternité comme des coquilles Saint-Jacques
L’une d’elles se brisera dès que tu la verras
C’est l’image de ton âme telle que je ne puis la connaître
La seconde viendra comme le vent dans une forêt d’automne
si rouge elle te sera plus lourde que l’enseigne de ton désir
Quant à l’ultime tu préféreras la jeter à la mer
Mais pour l’instant tu n’es pas encore toi-même
sortie de la mer qui rêve et coule au-dedans de tes os

THE THREE STARS

There are flat stars underground
and others that bloom in the heart of the clouds
I have with your absence broken up this certitude
that makes the world go a little less askew
in the disjoint of the color blue
The narrow way will hoist its chrysanthemum flag
on the brow of cycling cyclops
who at one stroke of the pedal goes around the sun
at the hour where the lawyers of the night will die
Until the end they will refuse to open sesame without horror
We’ll call we’ll cry we’ll hear from underground
we’ll know that seeds are germinating
in the hand of forgotten mummies
Over there some people have already got up from the table
old kings with dented crowns
will start swimming again in the volcanic trough
I think then of a ladybug and I see her
beat the drum in the garden which was an ossuary
Is this innocence or is it just a desert island

surrounded by wingless hooves nobody knows
A house can crumble here under the bravos
of our invisible creatures O my friends I wait for you
in its ruins that will be like ferns
sweeping the end of the world with their syllables of boxwood
Do not mistake the wrong window to open
There are huge sandy beaches behind all that
which will be furnished with fire extinguishers thieves of fire
Let’s wait for the lizards together
under the clouds engorged with ink and ashes
The sky of course is only makes up its head
It’s still a child who is always hungry
of caravels and heresies it is also a hollyhock
whose shadow is the skyline
Go there, there are seashells
in which is heard the sound of hell
Never come back and never braid a nest
for the docile birds of Saturn
Because there are only three stars underground
who are in eternity like scallops
One of them will break as soon as you see it
It’s the image of your soul as I can no longer know it
The second will come as the wind in an autumn forest
so red it will be heavier than the sign of your desire
As for the last you will prefer to throw it to the sea
But for the moment you are not yourself yet
out of the sea that dreams and flows in your bones